Aujourd’hui, j’ai fait ma première kermesse.
Pour ceux qui ne connaissent pas, la kermesse a lieu une fois par an, pour fêter la fin de l’année scolaire. Tous les parents sont sollicités pour tenir les stands de maquillage, pêche à la ligne, pêche aux canards, queue de l’âne et autres réjouissances du même genre. Ce sont eux, aussi qui sont en charge de la préparation de quiche, cake, salade, gâteau au chocolat, à la pomme ou au chamallow (si ça existe!). Je n’ai jamais vu de buffet plus appétissant que celui-là, mais ce dont je n’ai pas réussi à me rassasier c’est l’ambiance « bon enfant » (c’est le cas de le dire) qui se dégageait de cette fête.
Tout le monde met la main à la pâte, les parents se relaient tout au long de la journée dans les différents stands, accompagnent, aident, soutiennent les enfants des autres comme si c’étaient les leurs (et mieux encore). Chaque animation « coûte » une, deux ou trois croix sur les tickets pré-imprimés pour l’occasion: l’argent n’existe pas! (Si, c’est possible).
Même s’il pleut, même s’il y a du bruit, même si les gosses courent dans tous les sens, et s’arrosent avec des pistolets à eau en nous éclaboussant au passage, même si on ne peut pas s’asseoir et qu’on a mal aux pieds, les parents restent aimables, affables, souriants, et comme me le disait l’un deux: « C »est pas pour le prix qu’on est payé!…. ».
Pourquoi ce jour-là seulement tous les parents avec qui j’ai eu tellement de mal à établir un contact (cf: les 5 méthodes pour faire garder ses enfants sans dépenser un centime) me disent « bonjour » et me sourient de leurs plus belles dents (que je n’avais jamais eu l’honneur de voir auparavant)? Certains passent la journée à faire des crêpes (300 englouties cette année en quelques heures), d’autres à déchausser et rechausser les plus petits pour le château gonflable (je n’ose pas compter le nombre de lacets), d’autres encore à ramasser des balles en caoutchouc pour le chamboule-tout (5 balles multipliés par le nombre d’élèves de l’école (environ 500), divisés par 5 heures de kermesse égalent combien de balle ramassée par heure?…. et si on rajoute que 3 parents se relaient toutes les demi-heures, ça fait…).
Alors moi, je voudrais savoir où passe toute cette bonne humeur, cette bonne volonté, cette entre-aide, ce respect, cette attention aux plus jeunes, cette communication facile, ce sourire chaleureux et ce regard bienveillant… dans la vie de tous les jours? Où disparaissent ces parents-kermesse le reste de l’année? Pourquoi on ne les voit ni dans le métro, ni dans la rue, ni aux infos le soir?
Trouver le point commun
C’est quoi l’idée? On fait la bonne action de l’année au mois de juin, et ensuite on a le droit d’être con et égoïste le reste du temps? Imaginez deux secondes cet état d’esprit de partage et de rire au travail ou dans la rue….
On se sent en confiance et sécurité à la kermesse et on adresse la parole avec plaisir à toutes sortes de gens, parce qu’on partage le fait d’avoir nos enfants inscrits dans la même école? Si c’est seulement ce point commun qui donne cet effet là, alors pourquoi ne pas simplement penser dans la rue, qu’on a tous le point commun d’être des humains?… ou si ça ne suffit pas, qu’on a le point commun d’être dans la même rue au même moment (ce qui est une sacrée coïncidence, bien plus compliquée que d’avoir ses enfants inscrits à la même école, non?).
C’est trop dingue, ce dont on se prive sans même le savoir… Imaginez dans le métro…. que tout le monde se fasse la bise et commence à papoter de la pluie et du beau temps (car on est dans la même rame au même moment, quel point commun!!):
– Vous voulez la place?
– Non, merci je descends à la défense, d’ailleurs je suis en retard….
– Moi aussi!… C’est dur de se réveiller certains matin pour aller bosser…
– M’en parlez pas… et ma fille qui a fait un cauchemar à 3 heures du matin… j’ai jamais réussi à me rendormir.
– Moi, c’est mon ado qui est rentrée à 5h, j’arrivais pas à fermer l’œil…
– Vous voulez une part de cake?
– Oui!… Avec grand plaisir!.. Il est délicieux!…Vous venez?… On est arrivé.
ou dans la salle d’attente chez le dentiste (ça aussi, c’est une drôle de coïncidence, avoir le même dentiste!)
– Bonjour, moi, c’est Thomas
– Virginie…. vous attendez depuis longtemps?
– Oui, il est toujours en retard…
– Vous avez remarqué aussi?..Je ne supporte pas ces médecins qui s’imaginent que leurs temps est plus précieux que le nôtre… vous venez pourquoi?
– Des caries… Je sais j’ai passé l’âge…
– Vous n’êtes pas si vieux….
– Merci!… Vous êtes pas mal non plus… J’adore les bonbons, je ne peux pas m’en passer!…
– Moi aussi! Ça doit me rappeller mes grands-parents qui m’ont élevée…
– Moi, c’est seulement de la gourmandise…. vous en voulez un?
– Ok, mais chut, faudra pas lui dire…!
– Promis!
Bon, vous allez dire que je suis utopiste, d’autant que je viens de tomber sur un article sur le harcèlement de rue (au cours d’une promenade virtuelle nocturne: cf je suis cendrillon et vous?) qui va plutôt dans l’autre sens. Mais si tout le monde se parlait, est-ce que ça ne laisserait pas moins de place aux comportements déviants qui restent l’apanage d’une petite minorité toute petite pas bien grande?
Cela vaut-il la peine de se priver de la sympathie, la chaleur, de l’humanité des gens que l’on croise sur notre route par peur de quelque chose qui ne se produira peut-être jamais, et encore d’autant moins qu’il régnera ce climat de confiance et de sympathie?
Comme si on se privait de manger du poisson de peur de tomber sur une arrête,
comme si on refusait d’aimer, par peur d’un chagrin d’amour,
comme si on ne faisait pas d’enfant, par peur d’être réveillée la nuit
comme si on ne mangeait plus de bonbon, par peur d’avoir des caries (il marche moins bien, celui-là)
comment si on n’allait plus au ciné de peur de tomber sur un navet
comme si on n’allait plus à la kermesse de peur d’être déçue le reste de l’année….
Et vous, qu’est-ce que vous ne faites pas par peur de quelque chose?… ou plutôt qu’est-ce que vous feriez, si vous n’aviez plus peur?…..
crédit photo: shok
haaaa oui les Kermesses! J’ai organisé pendant 10 ans, membre très active dans l’APEL (asso des parents dans le privé), réalisation des tickets, des affiches, des invitations, panneaux sur les stands etc etc, en avant une tonne de boulot, le jour J-1 le montage des stands et le jour J se donner à fond avec les autres membres de l’APEL, plein des parents bénévoles et des instits. Un groooos boulot, mais qu’est ce qu’on ne faisait pas pour nos bambins?
Dès la à avoir une kermesse par jour partout qu’on passe? Je pense qu’un simple sourire suffirait pour améliorer le monde, et que ce n’est pas grand chose à demander à tout le monde, n’est pas?
Etre juste aimable et respecter le prochain (la caissière, le voisin dans le métro, dire bonjour dans la salle des médecins, rien de plus)…
Oui, c’est pas grand chose en fait…;-)
Je pense que c’est surtout la peur qui nous arrête… dans un espace clos comme une cour d’école, on peut donner libre cours à notre gentillesse naturelle… dans la rue, c’est une autre histoire 😉